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Interview // Zerolex

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Il s’appelle Jérémy, il a 24 ans et il habite Besançon. Depuis 2011, cet artiste fait de la musique électronique sous le nom de Zerolex. Rencontre avec un producteur authentique.

Comment peut-on définir Zerolex ? Tu es plutôt producteur ? Beatmaker ? Musicien ?

Producteur j’aime bien. Il me ramène plus à la création des sons, des textures. Un beatmaker, pour moi, se limite plus au hip-hop. Ces gens-là font des instrumentales. Musicien, je le suis aussi puisque je viens de la batterie à la base. Ceci-dit, je me sens plus producteur que musicien.

J’ai vite eu envie d’avoir un projet personnel où je puisse être vraiment maître de mes compositions.

Comment a commencé cette passion pour la musique ?

J’ai commencé par la batterie en 2005 quand j’étais adolescent. J’en ai fait pendant quatre ou cinq ans. Puis, j’ai vite eu envie d’avoir un projet personnel où je puisse être vraiment maître de mes compositions. J’ai eu l’opportunité de participer à un Masterclass autour du beatmaking en 2011 à Besançon, ce qui a été l’acte de naissance du projet.

Tu avais déjà une attirance pour le beatmaking à cette époque ?

Quand tu viens de la batterie, il y a déjà un aspect rythmique qui est très présent quand tu te décides à faire des instrumentales. Naturellement, j’ai commencé par le hip-hop avant de m’orienter vers la musique électronique.

L’EP Floating, apparu en 2013, était ton premier projet en tant que Zerolex ?

L’EP Floating est le premier à avoir été signé sur un label (Eklektik Records). C’est la première fois aussi qu’il y a eu un vinyle derrière, ce qui me tient beaucoup à coeur. J’avais sorti quelques EPs discrètement au début mais en effet c’est mon premier EP officiel.

Tu as fait quelques coproductions également comme avec Holy Two, peux-tu nous en parler ?

Le groupe Holy Two était venu me chercher pour faire un remix du morceau Rush. J’ai apprécié travailler avec eux, je leur ai proposé de faire un deuxième remix. Puis je l’ai aussi proposé à mon label de l’époque, Cascade Records, qui nous a soumis l’idée de faire un morceau ensemble dans le but de sortir un disque après. De fil en aiguille, l’EP Eclipse est sorti en vinyle avec les morceaux originaux, les remixes, une autre collaboration et des titres exclusifs d’Holy Two.

Récemment tu as sorti un nouveau morceau avec Holy Two, l’EP Eclipse a marqué le début d’une belle collaboration ?

Le chanteur d’Holy Two est originaire de Besançon, on était même à la maternelle ensemble, sa mère me coupait les cheveux ! (rire). On s’est perdu de vue pendant les études. Puis, on s’est retrouvé à Besançon en 2012 ou 2013, on s’est rendu compte qu’on était actif tous les deux et que ça pouvait être sympa de bosser ensemble.

S’il faut prendre quatre ans, je prendrai quatre ans.

Quel est ton rythme de production ? Est-ce que tu te fixes des objectifs ?

C’est un peu le hasard si j’arrive à sortir une production par an en moyenne. Je ne me fixe pas forcément d’objectif de timing. Si je sens que j’ai pas mal de morceaux de côté et que je peux en dégager quelques-uns avec une certaine cohérence, je n’hésiterai pas à faire une sortie. Par exemple, en ce moment je n’ai pas encore d’idée, mon prochain projet arrivera peut-être dans une ou plusieurs années. S’il faut prendre quatre ans, je prendrai quatre ans.

Comment définies-tu ton style musical et quel est ton style préféré ?

J’écoute tout sauf de la musique électronique. Je suis un passionné de vinyle et quand je fais des DJ sets disques, c’est essentiellement de l’afro, de la funk, de la soul, du jazz, de la disco. Parfois, je me demande si je ne devrais pas choisir un autre nom juste pour mes DJ sets car les gens s’attendent à avoir un set de musique électronique et ce n’est jamais le cas ou très rarement. C’est délicat de m’identifier à un style musical. Je ne fais ni du hip-hop, ni de la techno.

Peux-tu me citer un artiste qui t’a donné envie de commencer la musique et un artiste avec qui tu aimerais collaborer ?

Je citerais bien Fulgeance, je ne le cite pas souvent, c’est un Français. C’est devenu un ami aussi. Il a développé le “low club” où la musique électronique n’est pas forcément à 130 bpm et “casse-gueule”. Il a monté le label Musique Large où il y a pas mal de sorties qui me parlent. Notamment Il a sorti un EP chez Ed Banger.

J’adorerai collaborer avec un musicien ghanéen, à l’ancienne, qui me donnerait les pistes de son morceau et peut-être que je pourrais en faire quelque chose (rire). Honnêtement, ça serait plus excitant que de faire une collaboration avec un artiste juste parce qu’il est reconnu.

Ton dernier EP en date est Honesty, combien tu as mis de temps pour le produire ?

Entre quatre et six mois je dirais. Ce qui est assez rapide pour moi. Il y a des gens qui font des disques en un mois mais moi je n’y arrive pas. Sur cet EP, il y a deux boucles issues de samples et tout le reste c’est de la matière que j’ai moi même créée.
C’est un EP qui fait quatre titres, que j’auto-produit. Je l’ai sorti en vinyle en édition limitée de cent exemplaires.

J’avais envie de collaborer avec des gens proches et des gens dont je défends les projets. Il y a deux collaborations, avec Holy Two et Felp qui habite à Montréal. Dans ce projet, il y a une volonté de passer outre les labels et d’avoir mon bébé de disque. Pour les visuels, je les ai confié à un graphiste avec qui j’ai toujours travaillé qui s’appelle Renaud Vigourt et qui a réalisé toutes mes pochettes jusqu’à maintenant.

On sent une certaine continuité dans cet EP entre les morceaux avec une production soignée et un rythme plus lent que tes anciens titres.

C’est vrai. Sauf pour Conquest qui est un peu plus rapide, je l’ai pensé pour la scène. Pour les autres, ce n’est pas parce que tu fais de la musique électronique en 2018 qu’il faut faire de la techno ou quelque chose d’agressif. C’est plaisant d’écouter un morceau lent et beau, il soulève de nouvelles émotions. Pour tous les sons de l’EP, j’ai créé la matière sur un seul synthétiseur. Je souhaitais mettre en avant une réelle production qui allait au-delà de simplement chercher dans samples dans des banques sons. Je trouve que ça donne un grain et une cohérence aux quatre titres.

Je suis fier de la création de la matière qui a servie pour le projet.

Est-ce le projet sur lequel tu es le plus fier aujourd’hui?

Je reste plus fier de l’album qui est sorti avant, simplement parce que c’était le premier. Cependant, je suis fier de la création de la matière qui a servie pour le projet. C’était un véritable défi personnel. Même si la plupart des gens ne font pas attention à ce genre de détails, je peux en être fier.
On ne peut pas parler de consécration non plus. L’esthétique d’un morceau change beaucoup, je peux créer des sons encore plus lent ou même plus rapide, il est trop tôt encore pour parler de consécration.

J’aimerai beaucoup faire de la musique pour l’image.

En tant que producteur, as-tu prévu de travailler avec plus de voix pour accompagner tes productions ?

Non, pas pour le moment. Je le souhaite car ça me plait beaucoup. J’aimerai beaucoup produire pour d’autres gens. Retravailler des maquettes et les arranger à mon goût par exemple. Si c’est cohérent avec Zerolex, je le ferai avec ce nom. Dans le cas contraire, je n’aurai pas de scrupule à utiliser un autre nom.
J’aimerai beaucoup faire de la musique pour l’image. Des bandes originales par exemple. Récemment, on m’a contacté pour créer la musique d’une mini série de dix épisodes. C’est un beau défi !

Est-ce que tu arrives à vivre de la musique aujourd’hui ?

J’arrive à en vivre mais j’aimerai bien en faire à plein temps. Je suis intermittent depuis trois ans. Si la musique représente 20% de ma journée, je m’en contente. Il y a des partenaires avec qui il faut communiquer, des tourneurs, les labels. Il faut faire de la promotion aussi… Au final, la création musicale en elle-même est minuscule. En fait, je pense à mon tonton aux fêtes de familles qui répètes souvent “Alors le musicien, t’en es où ?”. Au fond de toi, tu aimerais bien faire de la musique toute la journée mais ce n’est pas possible. Il faut se fixer des périodes ou tu t’enfermes et tu produis uniquement. Puis, maintenant on passe notre temps à faire des stories de m**** sur Instagram (rire) !

C’est quoi la journée type de Zerolex ?

Alors déjà, il n’y a pas de matin (rire) ! Je ne fais pas ce métier là pour me lever le matin ! Puis quand tu fais des DJ sets jusqu’à 5h, tu ne te réveilles par à 8h le matin. Lorsque je me lève, je bois un café et je fais un petit tour sur les réseaux sociaux. J’aime beaucoup noter ce que je fais sur un papier et puis je barre une fois que c’est réalisé.
Parfois, je fais des sessions de deux ou trois heures d’enregistrement pour finalement ne garder que trois secondes. C’est très aléatoire.

Si tu étais un moment de la journée, lequel serais-tu ?

La fin de journée. Celle où tu es content d’avoir accompli ce que tu devais faire.
Sinon, j’aime bien les 3h ou 4h du matin où tu commences à faire n’importe quoi. Les heures où je montre mon c** en général (rire). Je resterai là-dessus. En fait, j’aime bien le moment où tu te dis “c’est trop tard”.

Un grand merci à Zerolex et Lucie pour nous avoir accordé cet interview.

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